Accueil
Dernières images
FAQ
Rechercher
Membres
Groupes
S'enregistrer
ConnexionUn client bien bavard | Constantin
Le petit manège dure quelques minutes, jusqu’à ce que, inévitablement, le sort en décide pour elle. Le bloc en bois se dérobe à ses pieds et le vide sous ses pieds la force à une attraction inévitable du sol. Un cri de surprise s'échappa des lèvres entrouvertes mais au lieu du choc brutal attendu ce sont des bras accueillants qui s’emparent de l’imprudente.
« Lin ! » gronde une voix grave. « Je te tiens, tout va bien. »
L’herboriste lève les yeux vers son sauveur tout trouvé. Un homme grand et imposant que l’on pourrait aisément qualifier de colosse. Entre ses bras, la jeune femme parait aussi fragile qu’une poupée de porcelaine. Les traits volontaires, la mâchoire carrée et des sourcils semblant toujours froncés, pourtant, malgré son allure rustaude, l’expression qu’il affiche est tendre et inquiète. Le visage qui surplombe Aelina était cette fois en partie masqué par une mèche blonde. Le reste de sa chevelure est parsemée de tresses fines sur le côté gauche de sa tête, l’autre côté étant coupé court au ras du crâne.
« Merci Yavor. »
Celui-ci laisse échapper un soupir avant de secouer la tête doucement et de la déposer avec une infinie douceur au sol. Il croise ensuite les bras avec une moue désapprobatrice. Il est certain qu’il a dans l’esprit de rappeler les priorités à sa protégée.
« Tu devrais me laisser gérer ce genre de choses. »
« Oui, je sais bien, mais je ne voulais pas te déranger pour si peu. »
« Tu aurais pu te blesser Lin. Aller, passe-moi ça je m’en occupe. »
Ordonne-t-il en tendant la main vers les outils encore en main de la jeune femme. Celle-ci s’exécute sans protester. Elle sait pertinemment qu’il a raison et elle serait bien incapable de le contredire bien longtemps de toute façon. Elle se contente d’incliner la tête et de se retirer dans l’arrière boutique afin de terminer la préparation de quelques remèdes qui lui avait été demandé de délivrer dans la journée.
Pendant que les deux compères s’activent le temps défile tant est si bien qu’il est finalement temps d’ouvrir la boutique. Aelina retourne alors dans la salle principale, ravie de constater que son acolyte en a profité pour réapprovisionner les stocks et mettre en valeur les produits se trouvant sur les étagères en hauteur derrière le comptoir. Elle n’a plus qu’à passer un rapide coup de balai pour rendre l’entrée propre et accueillante et terminer par emballer consciencieusement les produits tout juste préparés pour qu’ils soient transportés sans risque de casse lorsqu’ils devront être remis en main propre.
Elle eut à peine le temps de souffler que la cloche rattachée à la porte d’entrée se mit à tinter joyeusement. Un client ! Et bien matinal qui plus est.
S’il fallait trouver un point positif à ces insomnies, c’est qu’elles lui laissaient le temps de s’occuper de choses qu’il n’avait pas prit le temps de faire, comme le ménage. Enfin, le peu qu’il en laissait, il fallait bien trouver de quoi s’occuper, aussi traînait t-il un peu en longueur, ne se pressant absolument pas pour rattraper son retard en nettoyage. Ce n’était pas comme s’il risquait d’être en retard à son travail, ou encore de se rendormir. Ah ça non, une fois qu’il était bien réveillé c’était peine perdu. La maigre satisfaction qu’il y trouvait, c’est qu’il ne manquait pas de temps pour fumer, et généralement la plupart de ses herbes disparaissaient à une vitesse affolante lorsqu’il subissait une insomnie. Tellement affolante qu’il n’en avait presque plus. Il grogna de frustration alors qu’il remplissait sa pipe en bois, il allait faire un court détours dès qu’il le pourrait, il y avait beaucoup de choses dont il pouvait se passer, mais fumer n’en était pas une.
Lorsque l’heure y fût propice, il sortit enfin dans les rues désertes d’Hikmet. Après tout l’heure était toujours très matinale, croiser qui que ce soit était encore assez rare. Quitte à racheter des herbes pour fumer, autant qu’il achète autre chose en même temps. Il se demandait même s’il ne trouverait pas quelque chose pour son sommeil. Ça, ça lui arrangerait sacrément la vie, et autant faire d’une pierre deux coups.
Restait qu’il ne connaissait pas beaucoup de boutiques d’herboristerie dans Hikmet -pas qu’il s’agissait de quelque chose de très difficile à trouver, ou qu’il cherche d’une manière particulièrement motivée- aussi déambula t-il un peu dans les ruelles de la ville avant de tomber sur ce qu’il cherchait. Et plus rapidement qu’il ne l’avait espéré également.
Avant de pousser la porte et d’entrer dans la boutique, Constantin enleva instinctivement son chapeau avant de la garder à la main en entrant. L’ouverture de la porte fît tinter la cloche rattachée à celle-ci, et ses yeux cernés se posèrent sur les diverses étagères trônant dans la pièce avant de se poser sur celle qui semblait s’occuper des lieux.
Même s’il sentait les effets de la fatigue, Constantin s’évertuait toujours à puiser un peu d’énergie pour sembler frais et paré à tout. Même si dans le cas présent sa fatigue se discernait terriblement bien.
« Bien le bonjour ! » Commençait-il alors qu’il s’enfonçait dans la boutique d’un pas nonchalant, « Je sais qu’il est toujours assez tôt, mais je n’ai pas pu m’empêcher d’entrer lorsque j’ai vu que vous étiez ouvert. » Il marqua une pause alors que son regard se tournait de nouveaux vers les différentes étagères, avant de se poser une fois encore sur Aelina. « Je suis désolé de vous donner du travail de si bon matin, mais je cherche deux choses dont j’ai désespérément besoin, le premier pour aider mon sommeil, et le second pour fumer. Est-ce que vous pourriez m’aiguiller sur quoi que ce soit qui puisse m’aider ? » demandait-il avec un optimisme teinté d’un sourire un peu las.
« Bonjour Messire. » lance-t-elle aussitôt. « Ne vous inquiétez pas, je serai ravie de vous aider. »
L’homme avait une idée claire de ce qu’il était venu chercher en ces lieux. Deux, pour être précis. Difficile de déterminer pour l’instant ce qui pouvait perturber le sommeil de ce gentilhomme mais la seconde demande représentait un enjeu bien moins difficile à satisfaire. Se parant de son sourire le plus charmant, Aelina hocha la tête positivement.
« Vous êtes au bon endroit. Je vais voir ce que je peux trouver... »
La jeune femme quitta son poste pour se diriger vers une étagère éloignée où étaient disposés dans des pots étiquetés des herbes particulièrement recherchées pour tout dépendant au tabac qui se respecte. Elle suspendit son geste alors qu’elle s’apprêtait à récupérer l’un d’entre eux mais finalement elle se ravisa, n’en récupérant que deux au final. Ceux qui étaient réputés de plus grande qualité. Cet homme devait se le permettre financièrement… De plus, au vu de sa grande fatigue, il valait mieux ne pas lui donner de quoi cracher ses poumons inutilement.
Satisfaite de son choix, elle revint au comptoir, ouvrit les contenants et disposa des échantillons sur la table, bien séparés l’un de l’autre.
« Voici deux produits qui vont vous plaire, je pense. Celui-ci est suffisant pour une consommation classique, ce sont de feuilles à tabac que l’on trouve sur le grand continent mais il s’agit d’une variété de grande qualité. J’en ai aussi une autre variété, moins chère mais bien moins raffinée. »
Les yeux de l’herboriste glissèrent sur les feuilles à sa droite, sa paume s’y dirigeant également, suivant le mouvement tout en invitant l’inconnu à faire de même, elle poursuivit son explication :
« Et ici c’est une variété toute nouvelle qui ne pousse qu’ici. Je tiens à vous prévenir qu’elle est encore assez rare et donc moins accessible. Malgré tout, ses propriétés sont intéressantes, c’est pour ça que je vous la propose. Elle est plus forte en goût, n’étant pas consommatrice je ne pourrais pas vous dire si c’est une bonne chose… En revanche je peux vous dire qu’elle agit sur le corps en apaisant l’esprit. Je vous conseille de ne pas en abuser si vous ne voulez pas voir quelques étoiles flotter autour de vous. »
La jeune femme se tut, laissant à l’inconnu l’occasion de s’exprimer sur le sujet. Elle se tenait à sa disposition pour toute demande supplémentaire ou questionnement. Si cela lui convient, elle pourra alors lui indiquer les prix au poids, peser sa demande sur la balance mécanique qui se trouvait à disposition sur le comptoir et l’emballer avant de se concentrer sur la seconde demande, plus importante, concernant des solutions à son problème de sommeil.
Lorsque Aelina revint avec les produits au comptoir, Constantin sortit de sa profonde contemplation d’une plante pour se concentrer sur le plus important : ce qu’il allait pouvoir fumer. Si le produit plus banal était une obligation pour lui, il haussa un sourcil en regardant le deuxième produit. On aurait pu croire a de la perplexité, mais c’était méconnaître Constantin. Il était plutôt curieux. Ne pas trop en abuser, sous peine de voir des étoiles ? C’était très exactement tout ce qu’il fallait dire pour qu’il se laisse tenter pour acheter cette étrange variété de tabac. Et il essayerait probablement de voir ces fameuse étoile. Après tout, toute expérience était bonne à prendre.
-Je vais prendre la variété classique. Après tout la qualité et l’importation justifie aisément son prix. Mais j’avoue être très tenté par cette fameuse variété locale… Elle apaise tellement l’esprit qu’on peut aisément voir des étoiles ? Voilà qui me semble bien intriguant. Je vais en prendre aussi, je tâcherai de me modérer.
En tout cas il essayerait. Ce qui était moins sûr c’est qu’il réussisse jusqu’à la première fois ou il en fumerait un peu trop. Et ensuite il se calmerait sur la consommation de cette variété. Après tout, il fallait bien tester soi-même les propriétés de ce produit, et il était d’un naturel assez aventureux. Probablement un peu trop pour son propre bien. Restait encore à trouver quelque chose pour régler son problème de sommeil, et il aurait déjà rentabilisé sa longue nuit d’insomnie.
Si Galleren avait été là, il aurait eu un sourire suffisant, celui qui trahit clairement sa fierté. L’élève n’était pas mauvaise puisqu’elle venait de faire une vente supplémentaire avec sa variété surprise. Le client qui faisait face à l’herboriste était un curieux et il fallait bien admettre que cela faisait des affaires. Cependant, Aelina tâche seulement d’afficher une expression bienveillante.
« Combien je vous en mets ? Le prix est au grammage. »
La jeune femme écouta puis, une fois la quantité établie, elle déposa sur le côté gauche de la balance mécanique un poids et l’herbe de l’autre. Lorsque la machine s'équilibra, elle récupéra les herbes, les disposa dans un sachet et entreprit de faire la même manipulation pour les herbes standards.
« Et voilà pour le tabac. Vous avez besoin pour le sommeil également c’est ça ? Mh… Je dois avoir ce qu’il faut mais j’aurais besoin de quelques précisions : Cela fait combien de temps et est-ce qu’il s’agit d’un manque de sommeil ou est-il agité ? »
Tout en restant attentive aux explications de l’homme, l’herboriste s’activait à la recherche des ingrédients susceptibles de lui servir pour élaborer un breuvage efficace. En fonction du problème, il était possible que cela nécessite de la préparation mais elle avait bien quelques préparations à base d’huiles essentielles à humer ainsi que des herbes à thé qui pourraient apaiser son corps et son esprit… Elle-même connaissait bien ce genre de problème, son sommeil étant rarement profond et calme, il lui arrivait régulièrement de se lever en pleine nuit, remettre une bûche dans l’âtre et se réchauffer, une bonne tasse de thé entre les mains… Pour au final s’endormir là à même le sol, apaisée par les plantes.
Voilà que le sujet revenait à la principale raison de la présence de Constantin dans cette boutique : son sommeil qui était bien loin d’être complet et reposant. Quelles pouvaient bien être les causes de cet état de fait, c’était la question à laquelle il devait désormais répondre à Aelina. Il fit courir sa langue le long de l’intérieur de sa joue alors qu’il réfléchissait à une manière de décrire ce qui troublait ses nuits. Son regard fixé sur le comptoir, il tapota distraitement ses lèvres d’un doigt, avant de lever celui-ci pour enfin répondre à son interlocutrice.
« C’est… difficile à dire. C’est un sommeil agité, mais les durées ne sont pas toujours les mêmes. Parfois il peut s’agir de deux jours, une fois cela m’a poursuivit pendant une, voir peut-être deux semaines. Et ça repart parfois aussi vite que c’est venu. Hm... le temps entre ces périodes varie aussi parfois. Ça affecte parfois particulièrement mon humeur aussi, une autre raison pour laquelle je cherche à ce que ce problème cesse. »
Plus d’une fois il s’était réveillé en sursaut la nuit, un poids considérable faisant pression contre son torse. Après ce réveil tumultueux, le sommeil était un luxe qu’il cherchait parfois désespérément à retrouver, sans jamais y arriver pour autant.
Autant dire qu’il n’avait jamais vraiment trouvé de solution à ce problème. Il fallait dire qu’il n’avait jamais particulièrement cherché auparavant, mais il fallait bien mettre un terme à une situation qui perdurait de manière particulièrement insidieuse et dangereuse. Peut-être que ce que lui proposerait Aelina fonctionnerait, ou peut-être pas. Il n’avait pas vraiment quoi que ce soit à perdre, mise à part quelques pièces. Une maigre dépense pour un véritable sommeil.
« Peut-être que cette variété de tabac aidera un peu, puisqu’elle fait voir des étoiles selon la dose utilisée. Mais une solution moins extrême serait préférable. Ça risquerait d’entraver mon travail, et je préférerai ne pas prendre ce risque. »
Perdre ce pour quoi il avait travaillé avec acharnement était une perspective des plus amères. Une raison de plus pour trouver un moyen de mettre un terme à ces satanées insomnies, et d’enfin retrouver des nuits bien plus paisible que celles qu’il subissait depuis un certain temps déjà.
Feat Constantin Bonisseur
Le cas de ce client allait se révéler plus ardu que prévu. Sommeil agité, durées variables, pouvant s’étendre sur plusieurs jours. Évidemment, cela jouait sur l’humeur de l’homme, rien d’étonnant. Une fatigue qui s'accumule, d’autant plus lorsque l’on n’en connaît pas la raison ne peut que peser sur la santé mentale et physique à force de répétition. Aelina s’interroge à ce propos : Serait-ce dû à des angoisses passagères ? C’est possible. Cela pourrait aussi bien être la conséquence d’un traumatisme.
« Je vois… Je m’avance sans doute mais il est possible que vos problèmes de sommeil soient la conséquence d’un stress refoulé. Votre travail est-il particulièrement exigeant ? C’est une possibilité… Quoi qu’il en soit, le plus probable d’après ce que vous me dites, c’est que quelque chose vous tourmente l’esprit. Mais effectivement, je ne vous conseille pas de ne vous fier qu’à ce tabac. »
La jeune femme s’y connaissait bien en terme de traumatismes. Depuis qu’elle était devenue orpheline et vécu dans des conditions indécentes, elle avait développé des angoisses si grandes que son sommeil n’avait plus jamais réussi à rester paisible. Au point où parfois le simple fait de devoir fermer les yeux est une angoisse à lui-seul. Dans ce cas-là, Aelina n’a pas d’autre choix que de se forcer, quitte à consommer des produits puissants auxquels elle pourrait vite tomber en dépendance. Mieux valait éviter ce problème à cet homme.
« Bien… Voyons ce que je peux trouver… »
La jeune femme posa une paume contre son menton, l’air pensive. Finalement, elle sortit le grand jeu. Après tout, autant voir large pour ce genre de problème. Elle déposa quelques bocaux contenant des herbes et des fioles remplies de liquides aux couleurs diverses.
« Les solutions sont vastes, j’ai un peu de tout suivant ce qui vous conviendrait. Des solutions douces pour apaiser votre esprit et provoquer une légère somnolence. J’en ai beaucoup sous forme d’huiles essentielles à humer, herbes à thé à boire à consommer une ou deux heures grand maximum avant le coucher. Elles pourront vous apaiser et vous aider à vous endormir… Mais par contre elles ne font qu’aider à trouver le sommeil, ça n’empêchera pas forcément de vous réveiller dans la nuit. J’ai également des préparations plus poussées… Mais c’est à prendre en dernier recours car il y a des risques de dépendance. »
Elle désigna tour à tour les éléments qu’elle venait de disposer sur le comptoir :
« Au niveau des plantes en elles-même, il y a un assez vaste choix : Valériane, houblon, passiflore, aubépine,camomille, tilleul, ballote, pétales de coquelicot et verveine officinale… Si vous avez des préférences, je peux vous faire des préparations spécifiques en les associant avec des plantes aromatiques. »
La nuit était une maîtresse capricieuse, et Constantin aurait bien du mal à expliquer la cause de ce mal qui semblait le ronger et l’empêcher de s’abandonner à un sommeil bienvenu. Néanmoins il ignorait lui-même s’il s’agissait plus d’ignorance ou de gêne inconsciente d’expliquer ce mal qui sévissait. Toujours était-il qu’une explication claire et logique lui échappait entièrement. Il ne pouvait pas y faire grand-chose, et il si possible préférait éviter de s’attarder dessus, et passer directement au remède. Même si au fond de lui, il se doutait que pour qu’il y ait remède, il faudrait probablement dénicher la raison qui troublait son sommeil.
Devant l’exposé d’Aelina sur les possibles causes, Constantin haussa un sourcil interrogateur, d’avantage destiné à lui-même qu’à l’herboriste.
« Mon travail peut être exigeant oui, ça peut-être une possibilité. Je n’en suis pas vraiment convaincu, mais autant n’écarter aucune possibilité. »
Il gardait aussi en mémoire le conseil d’Aelina. Devant la difficulté qu’il avait à trouver sommeil, il pouvait être tentant de consommer le tabac récréatif qu’elle lui avait vendu quelques instants plus tôt. Mais ce ne serait qu’un remède temporaire qui se transformerait petit à petit en poison insidieux. Derrière une satisfaction immédiate et temporaire se trouverait les chaînes d’un mal bien pire que ce dont il souffrait dès à présent. Et il se refusait à se retrouver prisonnier d’une substance quelle qu’elle soit.
Devant la sélection de produits, et l’énumération de solutions qu’Aelina lui offrit, le juriste se gratte le menton d’un air pensif, soupesant le pour et le contre de chaque possibilité, chaque produit. Ses yeux se posaient sur bocals, fioles, observant leur contenu.
« Je ne vais pas vous mentir, je préfère d’autant plus les solutions douces. Une simple petite aide reste préférable à une substance qui m’assommerait et dont je ne pourrai plus me passer par la suite. En voulant soigner un mal, je le remplacerait simplement par un autre plus insidieux, et plus difficile à déloger. J’avoue ignorer les différents goûts et odeurs, n’étant pas un grand connaisseur de ces choses. »
Il jetait un œil intrigué aux différents produits disposé devant lui. Il ne s’était jamais vraiment intéressé aux thés, infusions, huiles essentielles, et autres. Mais si ces produits permettaient à ses nuits d’être plus douce et reposantes, il y voyait un intérêt beaucoup plus soudain.
Feat Constantin Bonisseur
L’homme était confus face au panel de possibilités qui s’offrait à lui. Cependant, il savait déjà quel type de solution était préférable pour lui : À savoir la douce. C’était déjà un bon point de départ. Aelina reprit donc les préparations plus poussées, les rangeant sommairement sur le meuble à sa droite. Il ne restait plus que les bocaux d’herbes diverses et les fioles d’huiles essentielles. Aelina réfléchit quelques instants, farfouillant déjà entre les bocaux.
« Solution douce donc. Très bien… Voyons voir ce que je peux vous proposer pour commencer… Mmh, attendez quelques instants, j’ai une idée. »
La jeune femme mit de côté trois bocaux de plantes et sorti un sachet de fleurs d’oranger séchées. Elle se saisit d’une boîte vide et la remplit avec ces cinq éléments. La préparation était plutôt agréable à regarder et il s’en dégageait un doux parfum.
« Je vous ai préparé un mélange de camomille, verveine, tilleul et fleur d’oranger. La camomille, la verveine et le tilleul ont des vertues apaisantes, calmantes et antispasmodiques, idéales pour apaiser l’esprit et trouver le sommeil. La fleur d’oranger apporte une note fruité au mélange et elle participe aussi à la relaxation. »
L’herboriste tend la préparation à son client afin qu’il puisse humer celle-ci et se faire une première idée.
« On peut faire des thés pour tous les goûts, c’est l’avantage de ce type de solution. Certaines préparations sont douces, d’autres fruitées ou encore amer. Celle-ci est assez bien appréciée en générale car elle allie douceur et gourmandise tout en ayant des propriétés idéales au sommeil. Mais il vaut mieux la consommer en début de soirée qu’au moment du coucher. »
Tout en parlant, elle saisit des flacons d’huile essentielle, les retournant pour lire les étiquettes accolées dessus. Elle en écarta quelques uns, en huma deux et finit par choisir la fiole dont la coloration était orangée.
« J’ai également une préparation d’huile essentielle qui se marie très bien avec ce thé car elle est composée de camomille, orange douce, palmarosa, petit grain bigarade et marjolaine à coquille… Les senteurs sont assez similaires et c’est simple d'usage. Il suffit juste de déposer quelques gouttes sur une soucoupe près d’une source de chaleur pour que l’odeur se diffuse. »
Pour appuyer ses propos, elle ouvrit le flacon qu’elle venait de présenter, afin qu’il puisse attester des propos de la boutiquière, et surtout savoir si l’odeur lui plaisait ou non.
Constantin observe avec une curieuse fascination l’herboriste préparer son obscure mixture à base de plantes, la regardant mettre les ingrédients au fur et à mesure dans le bocal afin que s’en dégage l’odeur appropriée. Il n’avait absolument pas la moindre idée de ce qu’elle faisait, à vrai dire elle aurait tout simplement pu le rouler dans la farine qu’il ne s’en serait pas rendu compte. Mais elle avait répondu à ses questions et demandes, c’était le comportement d’une professionnelle.
Lorsqu’elle lui tendit la préparation à Constantin, ce dernier approcha légèrement son visage du bocal afin de humer l’odeur s’en dégageant. Une révélation vint soudain à Constantin : ce mélange était certes agréable à sentir, mais jamais il n’aurait réussi à lister tous les éléments constituant ce parfum. Ça sentait bon, c’était tout ce qu’il aurait pu dire, et ça ne lui agressait pas les narines. Un résultat qui lui serait suffisant s’il s’agissait du remède miracle pour lui. Pour ce qui était de la relaxation, il faisait confiance à Aelina à ce sujet, ne sachant pas dire en quelques instants s’il serait réceptif ou non. Pour le savoir vraiment, il devrait sans doute l’essayer, et probablement revenir dans cette boutique. S’il retrouvait son chemin. Ça c’était un autre problème.
Venait ensuite une autre possible solution à son calvaire : les huiles essentielles que lui présentait déjà l’herboriste. Une autre solution dont il n’avait absolument aucune connaissance, et à laquelle il ne s’était jamais intéressé jusque là. Il se coucherait moins bête, s’il arrivait à dormir.
Il avait l’air tout aussi perdu lorsque l’herboriste farfouilla dans ses réserves, cherchant une fiole précise de ses huiles. Constantin lui laissait le temps, il n’était pas pressé par son travail ou quelconque autre obligation. Et il les effectuerait au mieux une fois qu’il serait remis de ce mal étrange qu’il n’arrivait toujours pas à expliquer. Lorsque Aelina trouva enfin la fiole qu’elle cherchait, le juriste reconcentra son attention sur celle-ci.
Alors l’huile pouvait être utilisé en complément du thé ? Pourquoi pas après tout, il pouvait bien essayer, il n’en mourrait pas. Et puis la vie était belle parce qu’elle était variée après tout, autant s’ouvrir à de nouveaux horizons, et si ça lui permettait de retrouver le sommeil, ce serait encore mieux. Il approcha ses narines du flacon, humant l’huile qu’elle contenait, avant de se reculer légèrement. C’était concentré, ça il devait l’avouer. Il comprenait un peu mieux pourquoi elle recommandait de seulement utiliser quelques gouttes. Il en avait presque envie de tousser. Il n’arrivait pas à savoir s’il était douillet à propos de l’odeur, ou si l’huile était particulièrement concentrée. Par fierté, il aurait largement préféré la deuxième solution.
« Hm, le thé est toujours une valeur sûre en toute occasion, mais j’avoue que je suis aussi curieux à propos de cette huile… Je n’arrive pas vraiment à me décider, c’est embêtant. J’imagine qu’essayer les deux ne me ferait pas de mal. »
En tout cas ça ferait mal à son portefeuille. Et ça lui éviterait peut-être de piquer du nez comme il était en train de le faire depuis un moment déjà, s'appuyant légèrement sur le comptoir pour dissimuler ce fait.
Feat Constantin Bonisseur
Aelina était plutôt fière de ses propositions mais après tout elle les avait choisies avec soin. L’une et l’autre convenaient très bien pour ce genre de problème et sauraient contenter un novice en la matière. Monsieur Bonisseur était d’ailleurs fort indécis, ses yeux passant de l’un à l’autre avec intérêt. Il annonça d’ailleurs à voix haute ne pas savoir quoi faire. Aelina eut alors une idée dont l’application pourrait se révéler intéressante sur le long terme… Une solution qui permettrait de donner l’envie de revenir et au pire des cas pourrait lui donner une bonne image s’il venait à évoquer à des connaissances la manière dont la commerçante avait agit.
« Je comprends, le choix n’est pas facile. Pour cette fois, puisque c’est votre première visite je vous propose d'acheter cette huile et je vous fais cadeau du thé. »
Évidemment l’huile était un peu plus chère que le thé mais il s’agissait tout de même d’un geste commercial qu’il serait dommage de manquer. Avec un sourire, la jeune femme lui remit les deux produits en échange de quelques piécettes. Celles-ci additionnées à celles obtenues avec l’achat du tabac pourront servir à financer quelques aménagements ou la restauration de la devanture. Ce n’était pas le genre de client qu’il fallait perdre, l’herboriste en avait bien conscience.
« Je fais aussi des livraisons à domicile. Si ces produits vous conviennent, je peux tout à fait en faire préparer chaque semaine ou chaque mois et vous les faire livrer directement chez vous. »
Sur ces dernières informations il convenait tout à fait de laisser ce brave homme repartir. Il avait l’air exténué mais elle retint l’homme encore un instant avant de le saluer, lui adressant quelques mots, non plus en tant que vendeuse, mais venant d’une intention plus sincère et amicale :
« N’hésitez pas à revenir… Même si vous n’avez besoin que de conseils ou simplement envie de discuter, ma porte est presque toujours ouverte. »
|
|
|
